Abstention record à Buenaventura en Colombie : le poids de la violence

Dimanche 13 mars 2022, les Colombien.ne.s étaient appelé.e.s aux urnes afin d’élire leurs représentant.e.s au Sénat et à la chambre des représentants, dont seize sièges des circonscriptions spéciales transitoires de paix (CITREP). Ces élections ont eu lieu dans un contexte d’augmentation importante des violences en Colombie, et en particulier à Buenaventura, sur la côte pacifique… 

Exacerbations des violences électorales à Buenaventura

Le contexte électoral actuel est marqué par une augmentation exponentielle des violences dans toute la Colombie. Les dirigeant∙e∙s sociaux∙ales sont particulièrement ciblé∙e∙s par ces violences. En témoigne la leadeuse sociale Amparo Toloza Campuzano  victime d’ un attentat le 7 février 2022. Alors qu’elle rentrait chez elle, trois individus armés ont tenté de forcer les portes de son véhicule pour la kidnapper avant de tirer à plusieurs reprises sur le blindage du véhicule, sans la blesser. 

Le département du Valle del Cauca concentre, à lui seul, 12,1% du nombre total d’actes de violence enregistrés en Colombie et est le théâtre du plus grand nombre d’agressions contre des dirigeant∙e∙s sociaux∙les. La Mission d’Observation Électorale (MOE) affirme que 15% des agressions  signalées depuis mars 2021 ont eu lieu dans ce département. Dans la région de Buenaventura, les dirigeant∙e∙s issu∙e∙s des communautés autochtones et afro-colombiennes sont les principales victimes. En effet, 11,9% des violences contre les dirigeant∙e∙s autochtones recensé∙e∙s au niveau national ont été perpétrées dans le département du Valle del Cauca et 2 des 4 dirigeant.e.s afro-colombien.ne.s assassiné.e.s entre mars 2021 et février 2022 ont été tués à Buenaventura. 

Les violences, obstacle à la participation électorale ?

Les déplacements et les massacres entravent la liberté de mouvement des citoyen.ne.s de Buenaventura, notamment pour se rendre aux urnes, et alimentent la peur des citoyen.ne.s. Les élections du dimanche 13 mars n’ont donc pas mobilisé les habitant.e.s locaux.ales, davantage préoccupé.e.s par leur survie que par la politique nationale dont iels sont les grand.e.s oublié.e.s depuis des années. Seul.e.s 32,76% des citoyen.ne.s de Buenaventura ont voté  pour élire leurs Sénateur.rice.s (contre 42,6 % en 2018). Le scrutin pour élire les 16 représentant∙e∙s spéciaux∙ales pour la paix, dans les circonscriptions transitoires spéciales pour la paix comme Buenaventura n’a pas non plus suscité une grande participation électorale dans la ville portuaire puisque seul.e.s 25,07% des citoyen.ne.s se sont exprimé.e.s sur la question, malgré l’enjeu historique.

Alors que des élections présidentielles en Colombie sont prévues le 29 mai et le 19 juin 2022, il est essentiel que les autorités colombiennes garantissent les droits démocratiques des citoyen.ne.s à jouir de la liberté d’élire ou d’être élu.e dans le cadre d’un processus électoral libre, transparent et équitable, sans mettre leur vie en danger. La communauté internationale et la France doivent s’assurer que l’État colombien respecte ses engagements pris sous les traités de droits humains internationaux et les Accords de Paix de 2016 en la matière et apporter un soutien aux défenseur.se.s et leader.euse.s sociaux.les de Buenaventura qui sollicitent de l’aide face aux dangers qui les menacent. 

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