COLOMBIE – alerte sur la poursuite des assassinats des leaders communautaires et des défenseur.se.s des droits humains

Dans un contexte de mise en application de l’accord de paix, les assassinats des défenseur∙se∙s des droits humains et leaders sociaux continuent d’augmenter en Colombie. Face à cette situation extrêmement préoccupante, le Réseau France-Colombie Solidarités demande à l’État colombien de reconnaître l’existence et le rôle des groupes paramilitaires dans ces homicides et de garantir la protection physique et psychologique de ses citoyen∙ne∙s et notamment de celles et ceux qui luttent pour la paix et l’amélioration de leurs conditions de vie et de celles de leur communauté.


Le Réseau France Colombie Solidarité (RFCS) condamne fermement l’assassinat d’Oswaldo Rojas, leader de la communauté de Curbaradó dans le Bajo Atrato, région Pacifique et du département du Chocó, le samedi 10 octobre 2020, par des membres paramilitaires des Forces unies d’autodéfense de Colombie (AGC).  La victime effectuait des travaux sociaux et agricoles dans le bassin du Curvará. M. Rojas a été kidnappé sur son lieu de travail et tué à 200 mètres de la ville de Llano Rico. Selon des témoins et la Commission Justice et Paix, les auteurs du meurtre sont des membres des AGC, qui agissent en présence d’unités militaires d’un bataillon de la Selva et de la police nationale à Pavarandó, Mutatá et Bajirá.

La famille de M. Rojas n’a pas reçu le soutien nécessaire des autorités compétentes et a dû conduire le corps à l’hôpital de la municipalité de Mutatá.  La maison du leader a été saccagée et son bétail, ainsi que des intrants agricoles et divers ustensiles ont été volés. En avril 2020, M. Rojas avait déjà été dépossédé de soixante hectares de ses terres par des entrepreneurs de l’agroalimentaire. Quelques semaines auparavant, les commandants militaires des AGC avaient proféré des menaces de mort à l’encontre de chefs de communautés « soupçonnés d’avoir des relations avec les Farc ». RFCS exprime sa solidarité avec la famille et les ami∙e∙s de M. Rojas.

Le RFCS exprime sa profonde inquiétude quant à la continuité des crimes subis contre les leaders sociaux et environnementaux du même village de Llano Rico tels que Mario Castaño et Hernán BEDOYA en 2017, et plus récemment le meurtre d’Esmender DIAZ OSPINA, fils du leader communautaire Luis Lecenio DIAZ, le 11 août 2020. Ces événements violents ont eu un grand impact sur les communautés afro-colombiennes de Curbaradó et de Bajo Atrato, qui résistent depuis de nombreuses années à la dépossession de leurs terres et aux projets agro-industriels et miniers et d’élevage extensif de bétail, réalisés par d’anciens officiers de l’armée, des hommes d’affaires privés et des paramilitaires.

Il y a quelques mois, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme avait déjà exprimé son inquiétude face au nombre important d’assassinats de dirigeants et de défenseurs communautaires en Colombie, une tendance qui semble s’aggraver, surtout dans les zones rurales. Ces régions sont caractérisées par la présence importante de groupes armés illégaux et de bandes criminelles et par l’absence totale de l’État (en particulier des autorités civiles, y compris le bureau du procureur général et la police), de sorte que les communautés ne sont pas efficacement protégées par les forces de l’ordre public. Aussi le manque d’accès à la justice et l’impunité persistante pour les meurtres et les violences commis contre les défenseur∙se∙s des droits humains constituent une invitation à continuer de violer les droits humains.

Au vu de la situation actuelle, le Réseau France-Colombie Solidarités demande à l’Etat colombien de :

  • Mener une enquête sur le meurtre du leader communautaire Mr. OSWALDO ROJAS et des autres actes criminels commis ces derniers mois dans ces communautés de la région et qui totalisent aujourd’hui plus de dix homicides et lutter contre l’impunité de ces crimes ;
  • Prendre des mesures immédiates pour protéger la famille de M. ROJAS contre toute action pénale et tout harcèlement ainsi que les dirigeants et membres des communautés afro-colombiennes et indigènes touchés par cette vague de répression des paramilitaires ;
  • Prendre des mesures immédiates pour démanteler les groupes paramilitaires, conformément à l’engagement du gouvernement ratifié le 13 octobre par le procureur général, M. Francisco BARBOSA, dans une déclaration publique concernant la clarification des crimes liés aux dirigeants sociaux ;
  • Assurer le respect et l’application des engagements internationaux pris en matière de protection des leaders sociaux et des défenseur∙se∙s des droits humains ;
  • Réaffirmer l’engagement politique en faveur de l’accord de paix, donner la priorité à sa mise en œuvre, en lui fournissant les ressources nécessaires pour ce faire, et en particulier les mécanismes de protection des défenseur∙se∙s des droits humains.

Au vu de la situation actuelle, le Réseau France-Colombie Solidarités demande à l’Etat français et à l’Union Européenne de :

  • Porter une attention spécifique à la situation de risque des défenseur∙se∙s des droits humains et leaders sociaux en appelant le gouvernement colombien à garantir immédiatement leur protection.

A propos :

Le Réseau France Colombie Solidarité (RFCS) est un collectif d’associations et d’organisations sociales de la société civile française, en lien avec des partenaires en Colombie créé en 2012. L’objet du Réseau est de renforcer les liens solidaires entre la France et la Colombie par la coopération.

Les membres du RFCS sont: Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT), Agir ensemble pour les droits humains, Amnesty International France (AIF), Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement – Terre Solidaire (CCFD-Terre Solidaire), Ecole de la Paix (EdP), Entre Todos France (ETF), Mâcon Solidarité Colombie (MSC), Peace Brigades International France (PBIF), Secours Catholique Caritas France (SC-CF), Travailler Ensemble Jeunes et Engagés (TEJE), Terre des Hommes France (TdHF), Solidarité Laïque  (SL).

Contact: Paloma Cerdan / p.cerdan@aedh.org

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